Histoire vraie à L'Union
J'ouvre de 1C, ma partenaire met 1SA, et comme j'ai une main de type 1SA, plutôt fort 16 ou 17H, je propose la manche à 2SA. Ma partenaire passe.
Elle fait 2SA +2. Il s'avère qu'elle a 8H, par A R x x x x à carreau, et donc un Valet assez inutile quelque part.
Je lui dis qu'elle aurait pu faire un effort avec cette belle couleur sixième par A R.
Elle me dit que là cela gagne parce que j'ai la Dame, mais que sinon elle n'a aucune remontée et qu'elle a craint de ne pas pouvoir affranchir ses carreaux.
Je réponds que très souvent, si, avec un coup à blanc : je lui ai annoncé au moins deux carreaux, et qu'ils sont le plus souvent 3-2 chez les adversaires. Et que je vérifierai les probabilités. Voilà, voilà...
Le calcul
En face des 6 carreaux, le partenaire qui insiste à SA a une main régulière, 2, 3 ou éventuellement 4 cartes à carreau. On peut calculer les probabilités de ces 3 cas (en éliminant les cas de singleton, chicane, ou 5+ cartes), qui s'établissent à 46%, 38%, 16%.
S'il n'y a que deux cartes chez l'ouvreur :
- dont la dame, on fait 6 levées dès que le résidu est 3-2, échec s'il est 4-1 ou 5-0 (même avec un 4-1, car on ne peut pas faire de coup à blanc, sauf à surprendre ensuite la D du R mais alors on perd une autre levée et la couleur est bloquée) ;
- sans la dame, avec un coup à blanc on fait 5 levées avec le résidu 3-2, échec s'il est 4-1 ou 5-0
S'il y a trois cartes :
- dont la dame, on fait 6 levées dès que le résidu est 2-2 ou 3-1. S'il est 4-0, on joue D pius un coup à blanc et on fera 5 levées
- sans la dame, on est obligé de faire un coup à blanc (à moins d'être extralucide et de savoir que le résidu est 2-2 mais c'est dangereux) donc on fait 5 levées dès que le résidu est 2-2 ou 3-1. S'il est 4-0 on peut peut-être s'en sortir avec deux coups à blanc mais on considérera que c'est un échec car les adversaires affranchiront leur couleur.
S'il y a quatre cartes en face, on fera presque toujours 6 levées, ou seulement 5 dans le cas d'une Dame troisième chez un adversaire.
Quand on mouline tout cela avec les probabilités :
- de trouver 2, 3 ou 4 cartes chez l'ouvreur, déjà indiquées ;
- que la dame soit en face, qui vaut le nombre de cartes de l'ouvreur divisé par 7, le nombre de cartes inconnues dans la couleur (c'est pessimiste car l'ouvreur annonce des points, il a plus de chances d'avoir les deux points de la Dame) ;
- de répartition des résidus 2-2, 3-1 etc.
On aboutit finalement à :
- 6 levées à 38%
- 5 levées à 45%
- échec, couleur non affranchissable, à 17%
Ces 7 points d'honneur valent une petite fortune, sauf accident (une chance sur 6). De plus le calcul est légèrement pessimiste, il suppose que toutes les cartes intermédiaires sont dehors.
Nota : la présence ou pas de la dame chez l'ouvreur intervient peu. Sans la dame les chiffres deviennent 13%, 69%, 18% ; c'est surtout un échange entre les cas 5 et 6 levées, mais la probabilité d'échec varie peu. Avec la dame, c'est 82%, 3%, 15% : ça passe ou ça casse !
Le 3SA était donc un pari très raisonnable. Seules 3 paires sur 8 l'ont demandé.
